Psychologues : obligations et responsabilités en matière de confidentialité

En guise d’introduction :

Les psychologues ne font pas partie des professions médicales, ni même des professions de santé, mais de fait ils collectent, stockent, traitent, transmettent et archivent des données personnelles et des données de santé. Ils sont responsables de ces données. Ce qui amène des questionnements dans leur activité à différents niveaux :

  • la prise de rdv : agenda
  • les dossiers patients quelque que soit leur format
  • les notes de séances (gestion/stockage/moyens de capture)
  • la transmission de documents
  • la Visio
  • l’échange entre professionnels
  • l’accès à différents types de plateformes (agenda en ligne, facturation, systèmes de paiement, tests…)
  • la publication de résultats de recherche

Un incontournable pour évoquer la confidentialité aux psychologues : Le secret professionnel !

Il semble souvent évident pour le grand public ou les professionnels eux-mêmes : les psychologues sont soumis au secret professionnel. Or il y a quand même quelques nuances à apporter. En effet, les psychologues peuvent être soumis au secret professionnel, par fonction ou par mission temporaire (du fait de leur employeur : PMI, ASE, MDPH ou d’une ’intervention ponctuelle dans une commission telle que la CDAPH), ils ne le sont pas (en l’état actuel de la loi) par état (du fait de leur diplôme/titre), ce qui rend notamment le cas des psychologues libéraux assez flou. Ce sont des précisions qui sont apportées par les auteurs de la seconde édition du livre “Droit à l’usage des psychologues en 60 notions” de Mélanie DUPONT et Pierre-Brice LEBRUN, 2024 : référence du livre ici

Bien que les psychologues ne sont pas tous soumis par la loi, au secret professionnel, ils sont tout de même renvoyés au respect et à l’observation des codes civil (article 9) et pénal (226-13 et 226-14), à leurs responsabilités à leur éthique et à leur déontologie, quels que soient nos modes d’exercice. Ajoutons de plus, que les citoyens Français ont des droits, et le respect de ces derniers n’échappe pas à cette profession.

Pour rappel :

  • Code Civil article 9 dispose que chacun a droit au respect de sa vie privée (choix personnels, droit à l’image, confidentialité des informations)
  • Code Pénal article 226-13 : sanctionne la révélation d’une information à caractère secret, d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende
  • Code Pénal article 226-14 : rappelle que la révélation d’une information à une autorité n’est pas obligatoire mais autorisée : elle renvoie donc à une évaluation, un positionnement professionnel et à un choix éthique

Discussions actuelles autour du secret :

Sur les réseaux sociaux on peut voir apparaître des discussions autour de récentes interpellations des psychologues au Sénat pour tenter de clarifier la situation : Jean-Pierre Sueur, Sénateur du Loiret. Question écrite 1818, publiée au Journal Officiel du Sénat le 28 juillet 2022 (page 3986). La réponse du ministère de la Santé et de la Prévention a été publiée dans le même JO le 12 janvier 2023 (page 209).

  • Elle n’a pas valeur de loi, ni même de règlement, elle ne fait pas jurisprudence : elle n’est qu’indicative. précisent les auteurs Mélanie DUPONT et Pierre-Brice LEBRUN

“Le ministère confirme ici […], que tous les fonctionnaires sont soumis au secret professionnel. Il estime que les psychologues libéraux ne sont pas tenus au secret professionnel par état, puisqu’aucun élément légal ne le prévoit, ils peuvent l’être “par profession”, ou en raison d’une “fonction ou mission temporaire”. Il rappelle qu’être soumis au secret “en raison d’une fonction ou mission temporaire” signifie “de manière ponctuelle et quand la loi le prévoit”, par exemple “dans le cadre d’une commission ou d’une instance”. Il semble en conclure que le secret professionnel s’appliquerait, par profession, à tous les psychologues : il manque néanmoins l’élément légal qui confirmerait cette astreinte par profession, qui s’est toujours entendue “par employeur” (ASE, PMI, SPIP, PJJ, etc.).”

  • A juste titre les auteurs questionnent : “Sans cet élément légal, comment savoir quelle profession y est astreinte ? qui décide ?”

L’arrêt 01-80.456 de la Cour de cassation, qui précise que “si un psychologue n’a pas la qualité de médecin, cette profession est elle aussi soumise au secret professionnel établi par l’article 226-13 du Code pénal.”

  • Les auteurs précisent à nouveau : il s’agit d’un arrêt isolé qui ne fait pas loi !

Loi de 2017 du Code de Santé Publique :

  • Les auteurs précisent n’avoir pas identifié d’article précisant quels professionnels sont astreints au secret.

L’article L 2213-1 du Code de la santé publique : il concerne l’interruption volontaire de grossesse (IVG)

  • Prête à confusion mais ne règle rien

La question semble donc bien loin d’être réglée et les auteurs concluent :

les psychologues ne sont pas – en l’état actuel de la loi – soumis au secret professionnel par état.

Rappelons également le cas du secret partagé

La loi Française rend possible le partage d’informations entre professionnels de la santé et les professionnels non médicaux dans le cadre du périmètre de leurs missions.

A 3 conditions :

  • D’informer le patient de son droit d’opposition à l’échange et au partage d’informations. Dans le cas où les professionnels ne font pas partie de la même équipe de soin, le partage d’informations requiert “son consentement préalable”, recueilli par tous les moyens (CSP, art. L. 1110-4).
  • Le partage se limite aux informations “strictement nécessaires”
  • Et il s’inscrit dans la coordination ou à la continuité des soins, à la prévention ou à son suivi médico-social et social.

Article L. 1110-4 du Code de la santé publique (qui a été modifié par la loi 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé)

La loi informatique et libertés protège les données personnelles et les données de santé :

Nous l’avons évoqué précédemment, les professionnels qui exercent directement ou indirectement dans le champ de la santé collectent et stockent des données personnelles et/ou de santé (et par santé on entend santé physique et mentale). Définissons d’abord ce que sont ces données : Selon la CNIL, Commission nationale de l’informatique et des libertés, dont le rôle est de réguler des données personnelles, d’accompagner les professionnels dans leur mise en conformité et enfin d’aider les particuliers à maîtriser leurs données personnelles et exercer leurs droits.

  • Une donnée personnelle est définie comme « toute information se rapportant à une personne physique identifiée ou identifiable ».
  • Les données de santé sont : “les données relatives à la santé physique ou mentale, passée, présente ou future, d’une personne physique (et cela comprend également la prestation de services de soins de santé qui révèle des informations sur l’état de santé de cette personne).  Se sont des données sensibles et qui sont encadrées par Loi informatique et libertés et le règlement général de protection des données (RGPD) : qui est un texte réglementaire européen entré en application le 25 mai 2018, encadrant le traitement des données de manière égalitaire sur tout le territoire de l’Union européenne (UE).

Et suivant les dispositions sur l’hébergement des données de santé par le Code de Santé Publique (art. L. 1111-8 et R. 1111-8-8 et s.), les professionnels doivent s’assurer que cet hébergement, quel qu’en soit le support, papier ou numérique, est réalisé :

  • Avec le consentement de la personne et qu’elle peut s’y opposer pour un motif légitime
  • Via des hébergeurs certifiés “HDS”. Le site de l’agence du numérique en santé, fournit une liste (régulièrement mise à jour) de tous les hébergeurs certifiés ici

voir aussi notre article de blog sur le sujet

voir aussi notre article de blog sur le RGPD

Le code de déontologie des psychologues (version 2021) :

Bien que sans valeur légale (et ne les protègeant pas.), le code de déontologie des psychologues refère à leurs devoirs et à leurs obligations légales pour ce qui est du respect des droits des personnes et de leur vie privée. Il les renvoie à leurs responsabilités en matière de confidentialité des informations qu’ils sont amenés à recueillir, à partager, à signaler, à détruire ou à transmettre (dans le cas d’une cessation d’activité), à réfléchir au traitement des notes (et ça concerne aussi le recueil, classement, et l’archivage). En matière de téléconsultation ou encore de recherche. Le code de déontologie définit les devoirs, sa mission n’est pas d’évoquer les moyens à mettre en place. Chaque professionnel est ainsi renvoyé à ses responsabilités et à sa liberté de choix de solutions.

Code de déontologie des psychologues

Pour conclure :

les psychologues sont donc des professionnels qui récoltent des données personnelles et de santé et doivent assurer :

  • de stocker ces données de manière sécurisée
  • avec l’accord des patients
  • de fournir une transparence du traitement et de la durée : Il n’y a d’ailleurs pas de durée légale pour les psychologues (à titre indicatif 20 ans pour les dossiers médicaux)
  • d’informer les patients de leur droit de rectification, du droit à l’effacement, à la portabilité, protection de l’accès contre la perte et le vol
  • Sur tous les formats : papier ou sur matériel informatique,
  • D’informer sur les Moyens de sauvegarde et comment nous nous prémunissons d’empêcher des tiers non autorisés d’y accéder